Poudrerie nationale de Toulouse - Emiettage du coton-poudre - 1943

 

Instruction de la poudrerie nationale de Toulouse

à destination de la dynamiterie de Paulilles - 5 novembre 1943

 

En 1943, la dynamiterie de Paulilles (Pyrénées-Orientales), a reçu de la Poudrerie nationale de Toulouse (Haute-Garonne), une consigne de sécurité relative à la manipulation du coton-poudre en atelier d'émiettage. Datée du 30 octobre 1943, cette consigne est étoffée quelques jours plus tard par une instruction complémentaire, précisant plus amplement les buts à atteindre, les modes opératoires à appliquer, ainsi que les consignes à respecter lors du traitement de l'explosif.

Le but est en effet de transformer les mottes de coton-poudre "en une masse homogène d'aspect floconneux", tout en respectant les consignes de sécurité inhérentes à la dangerosité du produit. Le traitement de la matière comprend donc quatre phases successives, depuis la livraison de la matière brute jusquà son stockage après manipulations manuelles et mécaniques.

Livré en caisses par des transporteurs le coton poudre est dans un premier temps débarrassé de tout corps étranger. Il transite ensuite par les ateliers de démottage et d'émiettage, dans lesquels il est tamisé. Trié, pesé et ensaché dans des sacs de couleurs variables selon sa qualité et son taux d'humidité, il est enfin stocké après étiquetage.

L'instruction émise le 5 novembre 1943 par la poudrerie de Toulouse à destination de Paulilles porte en particulier sur la séquence  d'émiettage du coton-poudre, ainsi que sur les consignes de sécurité. Déjà exposées dans la consigne d'octobre de la même année, leur redondance atteste, si besoin était, des risques d'explosivité de la matière traitée. Préalablement imbibé d'acide nitrique, le coton-poudre apparaît en effet comme un absorbant actif de la nitroglycérine et intervient dans la préparation de la dynamite, dont il amplifie la force explosive et l'action.

E. PRACA

 

DOCUMENT

Poudrerie nationale de Toulouse

Instruction numéro 72

Emiettage du coton-poudre

 

I – But de l'opération

Le but de l'opération et de détruire les mottes de coton-poudre qui se déshydratent mal et de transformer le coton-poudre en une masse homogène d'aspect floconneux.

II – Mode opératoire

Les transporteurs approvisionnent l'atelier en sacs et caisses à coton poudre qu'ils placent à proximité des tables de démottage. Ils disposent en 4 piles les sacs numérotés 1,2, 3,4.

A. – Démottage

1 – Brosser ou épousseter les sacs ou caisses contenant le coton-poudre.

2 - a) – Traitement du coton-poudre en sac : ouvrir les sacs. Vider le coton-poudre sur la table de démottage en prenant successivement un sac de chacune des piles numérotées 1,2, 3,4. Éliminer les corps étrangers.

2 - b) – Traitement du coton-poudre en caisse : ouvrir les caisses en utilisant les outils en bronze exclusivement (marteau et pince). Abattre les papiers d'emballage sur les parois latérales. Enlever à la surface du coton-poudre les moisissures et morceaux de papiers adhérents. Porter trois caisses ouvertes à proximité de la table de démottage ; mettre le coton-poudre sur la table en prélevant des quantités approximativement égales dans chaque caisse. Vider les caisses avec une pelle en aluminium. Ne jamais renverser la caisse sur la table ; éliminer les corps étrangers (vis, pointes, papier). Achever la vidange de la caisse à la main. Mettre les pointes dans l'étouffoir spécial.

3 – Briser les grosses mottes. Pousser le coton poudre dans la trémie de l'élévateur à godets en le faisant passer à travers la grille. Alimenter à la cadence correspondant au débit de l'élévateur.

B.  – Emiettage

Le coton-poudre remonté par l'élévateur tombe dans l’émietteur où il est forcé à travers un tamis. Il tombe ensuite dans une trémie à ensacher. Avant de mettre en marche, s'assurer que l'appareil a bien été nettoyé, sinon procéder au nettoyage. Pulvériser de l’eau au moyen d'une seringue par les portes de visite. Vérifier que les courroies sont sur poulies folles. Enclencher le moteur puis embrayer l’émietteur et l’élévateur. Placer deux sacs sous la trémie, faire remplir l’une pendant que l'on fait le mouvement de l'autre.

En cours de fonctionnement surveiller l'appareil et l’arrêter s'il se produit un échauffement ou un engorgement. Ne jamais laisser les courroies patiner.

Avant d'arrêter, fixer une durée notable (fin de la journée de travail par exemple). Nettoyer à fond les appareils (élévateur et émietteur) de manière à ce que leur mise en marche ne présente pas de danger (voir consigne numéro 120).

C.  – Pesage

Les divers cotons-poudres doivent être chargés en sacs dont le poids doit être ajusté. Pour chaque quart, le chef de division indique le poids de coton-poudre humide à mettre dans chaque sac, calcule en se basant sur le dosage et sur la moyenne des trois dosages d'humidité des plus récents connus.

Les pesées doivent être faites à +100 g près. Au début de chaque séance de travail, vérifier l'exactitude des bascules, en utilisant des poids approximativement égaux à ceux d'un sac.

Faire préparer les bascules qui ont perdu leur sensibilité.

Pour le coton poudre 1, utiliser les sacs normaux (sacs noirs) et pour le coton poudre 2, les petits sacs caoutchoutés retournés (sacs blancs).

Faire l’appoint en prélevant du coton poudre dans une caisse d’appoint dont le contenu doit être renouvelé fréquemment. Ces caisses sont à vider en particulier à la fin de chaque séance de travail.

D. – Stockage

Porter les sacs dans le 3e compartiment de l'atelier. Les disposer par ligne de 10 (10 lignes de 10) sur une hauteur de 3 sacs.

À la reprise, prendre les sacs par rangées, les trois sacs superposés étant enlevés ensemble.

Au cours de toutes les opérations, mettre en place les étiquettes indiquant le dosage.

III - Incidents

Il peut se produire des engorgements, on constate les engorgements à l’un des faits suivants :

- Il ne ressort plus de coton poudre de l'appareil normalement alimenté, la courroie patine ou tombe. Dans ce cas arrêter immédiatement l'appareil en déclenchant le moteur, faire tomber la courroie, ouvrir les portes de visite, débourrer l'appareil à la main, si l'on ne peut y arriver démonter les deux flasques, ce qui permet de débourrer très facilement à la main. Remonter ensuite l'appareil et remettre en marche.

- Le panier perforé de l’émietteur peut aussi se déchirer, on s'aperçoit de l'incident du fait que le coton poudre est mal égrugé. Arrêter l’appareil et vérifier la réalité de l’avarie en ouvrant la porte de visite de la paroi cylindrique.

Toulouse, le 5 novembre 1943

Le directeur

Signé : Fauveau.

 

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SOURCES

FAUVEAU, Directeur, "Poudrerie nationale de Toulouse. Instruction n°72. Emiettage du coton-poudre", Toulouse, 5-11-1943. Document dactylographié (Archives privées).

POUR EN SAVOIR PLUS

PRACA Edwige, Poudrerie nationale de Toulouse. Coton-poudre - Consigne 1943, site Amis de Paulilles, rubrique Risques, section Accidents/Grèves.